mardi 21 septembre 2010

Contenus mobiles: pourquoi beaucoup d'opérateurs abandonnent la partie!

De nos jours, toute l'industrie, tous les médias, ne font parler que des "applications", les nouveaux développement, les nouvelles plateformes et leur essor incroyable, avec un business très juteux!




AppStore oui, mais Vodafone live?

Néanmoins, on parle beaucoup plus de l'App Store d'Apple, de l'Android Market de Google et eventuellement des portails de téléchargements des autres fabriquants tels RIM (Blackberry), Samsung (avec son Samsung Apps) voir Microsoft (Windows Marketplace) et SonyEricsson. Mais on parle beaucoup moins de l'Orange Store, d'Orange World, de Vodafone Live!, de t-zones ou même de Litmus, la tentative d'O2 de faire dans les apps (ça a été lancé??).


Oui, je vois des pubs SFR, ou Bouygues, ou Orange sur l'iPhone et toutes les applis que l'on peut trouver. Mais ils ne communiquent pas sur leurs propres stratégies "contenus"; il n'y a aucune différentiation sur le produit tel quel. La différentiation se fait sur la tarification du téléphone ainsi que du "pack" data. Et encore, en France on ne peut pas dire que la concurrence fasse rage! L'entrée de Free va-t-elle tout chambouler?


Il y a bien cette dernière nouvelle d'Orange qui verrait bien un OS commun à Orange, Vodafone et Deutsche Telekom, mais bon, le temps qu'ils se mettent à table, on sera en 2015 et d'ici là...!!!


Désinvestissement sur les contenus téléchargeables / applis payantes.


L'absence grandissante (voir totale dans certains cas) des opérateurs sur les contenus mobiles (applications, jeux, etc.) au niveau communication reflète la situation sur le terrain pour une grande majorité des opérateurs de petite et moyenne taille, et une proportion non négligeable des "majors", en Europe mais aussi sur les autres continents! A savoir qu'autant ces opérateurs jouent à fond la carte des smartphones: subventions téléphones, pack internet, etc; avec des offres pertinentes et ciblées pour les jeux (M6 mobiles, NRJ mobile pour la France.); mais peu sont encore ceux qui tablent sur leur propre offre, la majorité "abandonnent" la partie.


En clair, ces opérateurs ne croient plus en la pertinence d'une offre contenus propre, et se positionnent uniquement sur les téléphones et la data; ils n'apportent plus aucun support à leur propre plateforme et même pire, ils externalisent le service à un prestataire de service qui va leur fournir l'hébergement du portail, l'hébergement des contenus, voir même les contenus eux-même en leur donnant mandat de signer les contrats de distribution (en général, de "re-négocier") avec les principaux fournisseurs de contenus. Le message est clair, il faut maintenir un service minimum pour assurer la transition car on a toujours quelques millions d'utilisateurs mobiles "traditionnels" (par opposition aux smartphones); mais au plus faible coût possible.


Rappel: je ne parle pas des "gros" opérateurs qui eux, y croient toujours plus ou moins, selon les cas!


Capitalisation sur les revenus data


Les revenus tirés des contenus mobiles ont toujours été relativement marginaux pour un opérateur; mais assez profitables et surtout leur permettant de communiquer sur des offres pour générer du traffic sur leur portail; et portail = data, seule source d'augmentation de revenus chez les opérateurs depuis quelques années. Donc un contenu d'une relative importance stratégique, musique et jeux mobiles pour la plupart.


Exemple: T-Mobile et Robbie Williams, ou Orange et King Kong pour le lancement de la 3G.


L'avènement de l'iPhone a d'une certaine manière affranchi les opérateurs de leur besoin d'avoir leurs propres contenus pour augmenter les revenus de la data. On comprends donc aisément pourquoi TOUS les opérateurs ont accepté sans broncher le business modèle d'Apple sur les contenus: 70% pour les éditeurs, 30% pour Apple, 0% pour les opérateurs!
L'iPhone, l'arme absolue pour les opérateurs leur a ainsi permis de capter de nouveaux clients (et des clietns "premium") quand ils avaient l'exclusivité (AT&T, Orange France, etc) et de voir une croissance sans précédent des revenus. Certains ont même accepté de reverser à Apple une partie des revenus d'abonnement, du jamais vu (ces clauses sont à présent éteintes)!


Les Echos écrivaient en février 2009 "L'iPhone est une véritable machine à cash pour Orange. Au terme de 18 mois, les 450.000 clients ayant acquis un iPhone 3G ont permis à l'entreprise de dégager un chiffre d'affaires de près de 700 millions d'euros". Ca se passe de commentaires.


L'arrivée sur le marché de concurrents de l'iPhone, et notamment des téléphones Android qui devraient bientôt supplanter l'iPhone en termes de ventes totales (on fera l'opposition App Store / Android Market) va permettre d'alimenter cette croissance du traffic data (et donc des revenus).


Arik Benayoun (Degroupnews.com) écrivait en mars 2010: "Le trafic 3G a dépassé celui de la 2G, et augmenté de 280% ces deux dernières années. Cette progression ne devrait pas s'arrêter en si bon chemin, puisqu'il est prévu que ce trafic double chaque année pendant cinq ans."


Jusque là, tout va bien! Les revenus sont au rendez-vous et prennent le relai sur une concurrence accrue sur la voix / SMS (un ARPU en baisse pour la plupart des opérateurs).


"Dumb pipes" ou "no dumb pipes"


C'est un classique, qui ne l'a pas entendu. L'article de Mobile Entertainment "Voda Chief: we're no dumb pipe" (nous ne sommes pas des tuyaux débiles", pour faire du littéral), daté du 19 novembre 2007. Vodafone avait claqué à la porte à Apple pour l'iPhone et croyait encore et toujours à sa bonne étoile.


Pourquoi est-ce toujours si important aujourd'hui?


C'est simple: la fourniture de contenus, c'est le clients qui l'obtient directement via les Apps que lui fournissent Nokia, Apple, Android, en laissant à l'opérateur le seul soin de leur fournir le téléphone et surtout les plans data. Il n'y a qu'à voir les pub iPhone (toujours aujourd'hui), aucune différence entre une pub SFR, une pub Orange et une pub Bouygues...  Le seul objectif est de rappeler aux clients que, "oui nous aussi on a l'iPhone".


Un téléphone exclusif, ça devient rare. Reste pour la différentiation les plans tarifaires (hormis bien sûr s'il y a entente illégale sur les tarifs, cf en France). Même Vodafone a abandonné ses téléphones Android vendus sous sa marque (le fameux H2), cf mon article sur Vodafone "Mobile operators and the content World. Episode 1: Vodafone 360".


Que resterait-il donc à l'opérateur: vendre des plans tarifaires, vendre des MB? D'où le commentaire du CEO de Vodafone. Mais aujourd'hui, c'est bel et bien là qu'ils en sont revenus, mais à présent cela n'a pas l'air de leur causer un problème, la croissance est au rendez-vous!


Mais où est le problème alors?


Autant sur l'iPhone, les opérateurs ont été mis à l'écart dès de début sur les revenus des applications (hors data); autant sur les autres téléphones, là n'est pas le cas. Que ce soit Ovi ou Android (pour prendre les plus grands), la facturation des contenus repose principalement sur la carte de crédit, informations déposées sur le mobile lui-même par un processus complexe auquel très peu de clients on adhéré, surtout quand on pense aux millions de téléchargements (Nokia mentionne "plus de 1,7 million de téléchargements par jour sur l’Ovi Store" en 2009; mais quid des revenus?)  - La facturation via l'opérateur n'est que très peu utilisée (Nokia mentionne 75 opérateurs dans 22 pays, franchement pas folichon pour un leader du marché), et in fine, à contrario d'Apple qui communique clairement sur son chiffre d'affaires sur l'AppStore (relativement faible, ~ $500 millions / an); Nokia ne communique absolument pas sur le CA généré, pour une simple et bonne raison: c'est anecdotique. Ce qui est sûr c'est que ça aide Nokia a rester "relativement" compétitif pour leur smartphones sur la bataille de com "oui on a xx milliers d'applications sur notre store"... c'est un must pour exister sur la planète smartphones.




Lire mon article "Google Android, Ovi, and the billing issue - why it's still an issue!!"


Quand on laisse le business à Android Market et Ovi qui font la part belles aux applis gratuites, et bien les développeurs boudent ces plateformes car ne font aucun revenus, et in fine on se trouve avec un portail rempli d'app de qualité très très discutable, d'autres très bien, mais gratuites!


Le fond du problème vient donc de deux choses:
1. Smartphones,  oui, mais il ne faut pas oublier sa base de clients. 


Pour la majorité des opérateurs de petite taille ou de taille moyenne en Europe et de part le monde (hors pays du G8 disons), la grande majorité des consommateurs ont toujours un téléphone "classique", devant accéder au wap pour obtenir des contenus!


Oui les smart phones arrivent, et vite; mais il y aura minimum 2-3 ans avant qu'ils ne représentent une majorités des clients. Si entre temps les opérateurs les délaissent, cela donne une très mauvaise image pour les consommateurs, et un manque à gagner sur les revenus de contenus et de data!


Certains opérateurs majeurs européens sont aussi dans cette configuration, malheureusement.






2. Il y a un avenir dans les applis smartphones!


Cela fait plus de deux ans que nous communiquons à nos clients "attention, les smartphones vont arriver en force pour concurrencer l'iPhone qui a tout révolutionné, il faut vous préparer"; résultat: ils sont tous aujourd'hui en mode de "préparation" de leur stratégie, avec donc un an de retard actuel plus au moins un an avant qu'ils n'arrivent à mettre en place quoi que ce soit (s'ils le font). A priori, ils laissent tous HTC, Nokia, Samsung, SonyEricsson, etc faire leur propre store (Android ou Autre). L'arrivée des Android low cost de Huawei risque aussi de bousculer les marchés porteurs pour les contenus mobiles!


D'un côté donc vous avez un son de cloche qui vous dit "oui, on va faire quelque chose, mais de l'autre, on voit bien que le focus n'est vraiment pas là!


La force des opérateurs: Certains opérateurs néanmoins croient toujours en leur pouvoir d'apporter un plus aux consommateurs! Ce plus, c'est a) un environnement eCommerce bien huilé (facturation, traffic), b) une relation cliente privilégiée, de confiance et c) l'image d'innovateur dans les médias mobiles.


Les opérateurs peuvent donc largement combler les lacunes des autres "AppStores", il
 y a donc un avenir réel pour les opérateurs dans les applis / contenus sur smartphones, d'autant plus qu'il s'agit d'un marché à très, très forte croissance (et à valeur ajoutée), et surtout sur les terminaux Android!




La solution: un environnement "maitrisé", outsourcé aux spécialistes!


De même qu'Apple a fait la part belle aux développeurs pour le partage des revenus, opérateurs devraient en faire de même, et même aller plus loin.


Contrairement à Apple qui a construit son propre environnement lui-même, les opérateurs n'ont ni le temps, ni l'expertise d'en faire de même (cf article sur vodafone 360).


La stratégie grandissante de nos jours, c'est donc l'externalisation des services à un prestataire. En soit, il s'agit d'une bonne stratégie, reconnaître que cela n'est pas leur cœur de métier ni expertise.


Les aggrégateurs: plus un problème qu'une véritable solution


Là où le bas blesse, c'est dans le choix des partenaires. Beaucoup prennent des aggrégateurs, c'est à dire des prestataires qui arrivent avec une solution globale, pour tous les contenus. Ce sont soit disant des spécialistes de la distribution, avec un libellé "plateforme eCommerce, etc."  mais en fait, ce sont des généralistes, intermédiaires entre les vrais spécialistes, et les opérateurs. Sur le marché Européen et au Moyen-Orient - Afrique du Nord, ce sont des sociétés souvent composées de petites équipes qui ont concocté une plateforme (avec un certain degré d'expertise, il est vrai), mais qui vivent sur de très, très faibles marges par téléchargements sur le portail; cette marge ne leur permet pas d'être profitable et surtout de pouvoir innover pour suivre l'évolution technologique. De plus, quand ils ont aussi le chapeau de "Master Content Provider", c'est à eux qui revient de sourcer les contenus et signer des accords de distributions avec les éditeurs, le prix des contenus vendus aux consommateurs étant relativement fixé d'avance, leur marge se constitue surtout sur les contenus obtenus à faible prix (et très souvent, de très faible qualité); ceci portant préjudice à l'industrie entière in fine!


Rappel: je ne parle que des contenus téléchargeables et notamment les jeux mobiles (qui représentent la catégorie #1 de contenus payants téléchargés sur les AppStore):


Voici quelques éléments concrets ettayant mes affirmations. Les "majors" de l'aggregation de contenus téléchargeables quittent le business et ré-orientent leur business modèle


Buongiorno: Société italienne, CA 2009 €259 millions, se positionnant comme, je cite, "world's No. 1 company in mobile entertainment", se focalise à présent plus sur le business B2C et le monde des applis, qualifiant leur business B2B de "volatile" et précisant que cette partie de leur busines "saw a significant slowdown in revenue in the first six months of the year compared to the same period of last year [...] this was accompanied by a further downturn in the interactive TV business, which gave high earnings with a modest profitability level - source: Buongiorno 2010 H1 report





End2End, a annoncé fin décembre 2009 mettre fin à ses contrats d'hébergement de portails pour les opérateurs pour se focaliser sur la monaitisations des applications, voyant que les opérateurs délaissent ce marché (source: Mobile entertainment), bien qu'un an avant ils aient gagné le prix de "Best Managed Service Platform" par Mobile Entertainement, comme quoi les choses évoluent très vite!!


Aspiro, aggregateur autrefois incontournable des opérateurs nordiques, Aspiro a annoncé en juillet 2010 la vente de sa division "mobile entertainment", cad aggrégation de contenus pour se focaliser sur les solutions streaming (musique, etc).


Ces exemples illustrent parfaitement le changement d'un business modèle de distributeur / intermédiaires "tout en un" à celui de spécialistes dont je parle!


Fox Mobile: Surtout connue pour sa marque "Jamba", société vendant surtout des contenus en B2C, mais aussi des deals d'aggregation de contenus notamment pour le groupe Orange (deal signé en février 2009). Fox Mobile appartient au Groupe Newscorp. Hors celui-ci a confirmé récemment (Août) vendre sa branche Fox Mobile qui lui a fait perdre $217 millions au 4ème trimestre de son année fiscale!! Eux aussi se focalisent depuis sur la vidéo et les applications (tiens!)




Les "petites" sociétés ont donc pris le relais, s'engouffrant dans la brèche, fonctionnant sur les capitaux levés encore fraichement, mais ça ne durera pas et déjà bon nombre sont sur la scelette! Le problème c'est que pour changer de prestataire quand celui ci gère toute votre offre avec un contrat pluri-annuel, bonne chance!!




Un environnement "maitrisé donc!


Il convient donc aux opérateurs de créer un écosystème favorable, innovant et réactif pour pouvoir capter toute la croissance générée dans le marché. Et qui donc que les spécialistes peuvent fournir le service aux opérateurs?


L'opérateur se doit donc de créer sa stratégie contenus en partenariat avec ces sociétés leaders sur leur marché; construire les fondements d'un écosystème cohérent, c'est à dire une ergonomie commune, une connectivité aux moyens de paiement et une politique éditoriale pour les points les plus importants, laissant aux partenaires le soin de fournir leur propre solution technique qui, si les partenaires sont bien choisis, sont à la pointe de l'innovation. Chacun tire donc profit des avantages des autres.


Effectivement, cela demande de mettre en place quelques partenariats, et plus de travail que de signer avec un seul partenaire; mais chaque spécialiste apportera beaucoup plus à l'opérateur qu'un généraliste. D'autre part, en terme de business modèle, l'opérateur devra se caller sur le business modèle d'Apple et de Google, comme le font Vodafone et timidement Nokia d'ailleurs. Ceci permettra de favoriser l'innovation chez les partenaires.


Pour la partie jeux par exemple, prendre le 1 voire 2 sociétés innovantes sur le marché pour mener à bien l'innovation et faire en sorte que l'offre soit au "top niveau", et ensuite un "agrégateur" technique standard pour laisser une chance aux petits développeurs, sachant que sur l'innovation il est très rare de voir des petits développeur construire une offre fournie et soutenue. Ce système a pour avantage sa réactivité, son faible cout (les couts d'hébergement, création, etc sont soutenus par le partenaire), tout en montrant une grande innovation aux consommateurs.


Mais cela implique des changements radicaux chez les opérateurs: ils doivent faire plus confiance à leur partenaire et lâcher du lest, au lieu d'être des "control freaks" voir des radins! L'embêtant c'est que pour beaucoup de ces opérateurs, ils ne s'en rendront compte qu'une fois trop tard; ça a déjà commencé!



















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